BRAINBOX

Bonheur de retrouver Racine qu’on n’entend plus guère et ses alexandrins nerveux et électriques ! Bonheur de se perdre et de se retrouver dans les passions folles de héros égarés avec une rage quasi enfantine dans leurs désirs impossibles !

 

Muriel Mayette, patronne du français, met en scène avec une sobriété, une rigueur, absolument classique, Andromaque de Racine, créé en 1667 alors que le poète n’avait que vingt-hui ans. Pure merveille que cette tragédie qui sur fond de Guerre de Troie à peine achevée met en présence quatre personnages – deux hommes, deux femmes – qui aiment désespérément celui ou celle qui ne l’aime évidemment pas. Ronde infernale de l’amour, solitude hystérique, goût du malheur et haine de soi, la pièce aux résonnances si musicales, si harmoniques est d’une noirceur insupportable. Car, non seulement l’intime est sans issu, mais le politique plein de fureurs guerrières passées ou à venir est résolument menacé ou fermé lui aussi.

 

Est-ce pour donner de l’air à ce climat si étouffant ? Le décor d’Yves Bernard se limite à quelques colonnes sous une lumière douce d’abord, puis crépusculaire. Les acteurs s’y montrent et s’y cachent, vêtus de costumes vaporeux, aux couleurs grises, beiges, aussi fragiles que leurs âmes inquiètes.